lundi 28 novembre 2011

Le combat des Égyptiennes contre le harcèlement


Plus de 80 % des Égyptiennes sont régulièrement victimes d’agressions verbales ou physiques


J'ai été touchée par cet article mais aussi par le film "La Source des Femmes". Un constat journalistique et une fiction qui montrent la place des femmes dans la société musulmane. Tout en connaissant le regard négatif que porte les européens sur les traditions musulmanes, je me pose pas mal de questions à ce sujet. 
Il faut savoir qu'en Europe, la violence contre les femmes existe aussi! 
Les campagnes de sensibilisation ont permis à bien des femmes de dénoncer cette situation et donc de commencer un premier pas vers plus de protection, ce qu'elles ne faisaient pas dans un passé proche. Ce qui donne l'impression que la violence à l'égard des femmes augmentent alors qu'elle est plus souvent dénoncée.

"Dans un communiqué du 25 juillet 2011, la Fédération Nationale Solidarité Femmes indique ainsi que les appels au numéro d'urgence 3919 ont augmenté de 50 % par rapport à l'année 2009 et que « le nombre d’appels par jour pour violences conjugales a été deux fois plus important en période de campagne médiatique »." Info extraite du blog "Le Monde"

Je cède la parole à Gaëlle Rolin, journaliste pour le "Figaro Madame"

Depuis la chute d’Hosni Moubarak, l’Égypte poursuit, dans les heurts, son chemin vers la démocratie. Les femmes savent que la révolution sera salutaire pour le pays, mais pas suffisante pour leur permettre d’exister à leur juste valeur dans une société profondément machiste. Les harcèlements dont elles sont victimes chaque jour témoignent de ce mépris de masse.
Dans la rue, dans les transports, dans les foyers. Du regard très appuyé qui vous déshabille, jusqu’à l’agression physique. C’est le lot quotidien des Égyptiennes. Selon une étude du Centre égyptien des droits de la femme, 83 % d’entre elles se disent régulièrement victimes de harcèlement.
Un état de fait qui pousse la nouvelle génération de cinéastes à s’emparer du sujet. Dans Les Femmes du bus 678, de Mohammed Diab, qui sortira en France en mai prochain, Fawzia combat les mains baladeuses dans les bus bondés en épinglant les sexes des hommes. Et Nelly porte plainte pour harcèlement. Son personnage est inspiré de l’histoire de Noha Roshdy, une actrice d’une trentaine d’années qui, en 2008, a osé poursuivre son agresseur en justice. L’homme, un chauffeur de taxi, était sorti de sa voiture pour lui empoigner les seins. « Cette affaire est un exemple, car il est très rare que les femmes osent porter plainte », explique Shahinaz Abdel Salam, blogueuse et auteure de Égypte, les débuts de la liberté (Éd. Michel Lafon). « La plupart du temps, les policiers refusent de prendre leurs dépositions, car ils estiment que c’est de la faute des femmes. »

Comment apaiser les tensions ?

Selon Shahinaz, qui se dit concernée par cette pression masculine depuis l’âge de douze ans, le changement est apparu dans les années 80. De nombreux Égyptiens sont allés travailler dans les pays du Golfe et en sont revenus avec des influences wahhabites qui ont pesé sur les mentalités. « Et cela s’ajoute au fait que l’Égypte vit oppressée par un état militaire. Pour exprimer leur désespoir, les hommes se déchargent sur les femmes. »
Pendant les dix-huit jours de la « révolution du Nil », les choses se sont étonnamment pacifiées. Pourtant, hommes et femmes dormaient ensemble sur la place Tahrir. « Les hommes luttaient pour une cause trop importante pour penser à attaquer le corps des femmes ! », lance Shahinaz.
Reste que le 11 février, jour de l’annonce du départ de Moubarak, la journaliste de la chaîne américaine CBS, Lara Logan, a été physiquement agressée par un groupe d’hommes. Après avoir réussi à la séparer de son garde du corps, ils ont arraché ses vêtements et pratiqué sur elle des attouchements pendant plus d’une demi-heure. Quelques semaines plus tard, le 9 mars, l’armée disperse une manifestation. Dix-huit femmes sont menottées, battues, électrocutées à la poitrine et aux jambes, puis soumises à des tests de virginité, une pratique destinée, selon un général, à protéger les soldats des accusations de viols.
Le 24 novembre dernier, Caroline Sinz, envoyée spéciale de France 3, et Mona al-Tahawy, une journaliste américano-égyptienne, ont également déclaré avoir été frappées et agressées sexuellement au Caire. La première, par des hommes en civil. La seconde, par des policiers.
Au regard de ces exactions, les mots d’Aliaa Elmahdy prennent tout leur sens. La jeune Égyptienne, qui a récemment défrayé la chronique en s’affichant nue sur son blog, a expliqué son geste dans une interview à CNN. « Je n’ai pas honte d’être une femme dans une société où les hommes ne savent rien du sexe ni de l’importance des femmes. Pour eux, le sexe, c’est juste un homme qui utilise une femme, sans aucune communication entre eux. » Shahinaz Abdel Salam salue le courage d’Aliaa. « Elle écrit depuis longtemps sur la situation des femmes en Égypte, elle a voulu faire un acte choc. Mais j’ai peur pour sa vie. » La jeune femme et son petit ami, un blogueur influent qui a pris la fameuse photo, ont été assignés le 17 novembre devant le procureur général par un groupe d'étudiants, pour incitation à la débauche.
Une pensée exclusivement masculine
L’ouverture démocratique, en donnant davantage de perspectives aux hommes, apaisera-t-elle les tensions ? « Il faut d’abord que l’armée parte, qu’un Président soit élu et une nouvelle Constitution, votée », explique Shahinaz. Mais faire évoluer l’image des femmes relève d’un combat plus ambitieux encore. « Les activistes féministes sont peu soutenues. Les Égyptiens sont influencés par une tradition, une culture et une pensée exclusivement masculine. Il faut une révolution des mentalités, et avant tout, une relecture féminine des textes religieux. »

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